Le réglement ou la loi

Nicolas Sarkozy veut en finir avec les pratiques des "patrons voyous". Il se dit prêt à légiférer pour encadrer les rémunérations des chefs d'entreprises aidées par l'Etat si le Medef n'agit pas lui-même. Une démarche qui pose la question du capitalisme et de la morale. 

Valéo, Société générale, Crédit agricole par sa filiale Cheuvreux: il y a un vieux débat qui resurgit chaque fois qu'il y a une crise économique et sociale en France. Le capitalisme est-il compatible avec la morale ou non ? Certains répondent qu'il lui est totalement étranger; que le capitalisme est une organisation de l'économie qui ne vise qu'à faire gagner le plus d'argent possible à quelques uns; et qu'il serait vain et contreproductif de vouloir le brider. D'autres sont plus nuancés. Face aux scandales à répétition, ils dénoncent les patrons indélicats sans condamner le système et exigent une réglementation pour éviter les excès en tous genres et la dégradation de l'image du patronat; c'est le cas de Laurence Parisot, la présidente du Medef, qui avoue n'avoir ni le pouvoir ni le désir d'imposer par la loi. Et puis, il y a ceux qui se prononcent en faveur d'un texte législatif pour encadrer les rémunérations des patrons des entreprises bénéficiaires des aides de l'Etat. L'opposition est sur cette ligne. Mais aussi une partie de la majorité pour laquelle le capitalisme ne peut pas s'auto-moraliser sans aller contre sa nature profonde.

Nicolas Sarkozy évolue entre ces positions. Pourfendeur des "patrons voyous" pendant la campagne présidentielle de 2007, il se retrouve aujourd'hui, avec la crise et l'envolée du chômage, au pied du mur et contraint d'agir. D'où sa menace d'avoir recours à la loi pour encadrer les rémunérations des patrons d'entreprises aidées par l'Etat, même s'il n'y est pas vraiment favorable. D'où également son idée d'un meilleur partage des profits qui a poussé Laurence Parisot à mettre en garde contre la tentation d'aller de "rodomontades en fanfaronnades". D'où enfin sa petite phrase sur l'âne que l'on ne peut obliger à boire quand il n'a pas soif et sa menace d'avoir recours à la loi pour réinjecter un peu de morale dans un monde économique trop brutal. 

La présidente du Medef fait la sourde oreille. Elle préfère mettre en avant son code de bonne gouvernance adopté en janvier dernier par son organisation. Il y est question d'intérêt collectif, de cohérence des salaires et d'interdiction de parachutes dorés. Autant de bonnes intentions qui visent à affirmer que l'autorégulation vaut mieux que la loi, ce qui n'a pas été vérifié à ce jour...  

2 Comments

Du point de vue de la morale, je trouve juste et digne la volonté du chef de l'Etat de régler cette histoire de salaire des patrons en légiférant. Je me demande neanmoins si la loi peut régler tous les problèmes de la res publica. A mon avis, une moralisation profonde de la vie publique des citoyens sera la meilleure solution.
Raymond Foli Dosseh

Nous assistons ces jours-ci à un véritable lynchage des patrons de grandes entreprises. Des gens qui gèrent des milliers de personnes et qui créent de la richesse dépuis des années méritent à mon sens un peu plus d'égard. En donnant ainsi dans l'émotion, on risque de nuire à l'esprit d'initiative qui est moteur de croissance. En dehors de leur caractère symbolique , je ne crois pas que les traitements tant décriés des patrons pourront aider à résoudre la crise actuelle.