La même question avait été très doctement formulée par les plus savants politologues français pendant la campagne présidentielle de 2007, la part de l'image. Elle est ensuite revenue sur le tapis à l'occasion de la prestation du Zénith dont on a principalement retenu une nouvelle coiffure, une tunique indienne bleue aux reflets chatoyants, un climat mystique et le mot fra-ter-ni-té scandé comme aux premiers jours des congrégations. Et puis, il y a eu une période d'apaisement avant que l'interrogation resurgisse et enfle au rythme des doutes, de l'approche du congrès de Reims, puis de la défaite face à Martine Aubry. La métamorphose était accomplie. L'incertitude était devenue une certitude: Ségolène Royal avait un "petit" problème de communication, le mot "petit" relevant tout simplement de l'euphémisme dans la bouche de ceux qui évoquaient le sujet.

 Le voyage au Sénégal de Ségolène Royal a donc été l'occasion de vérifier si sa capacité à créer l'événement, à monopoliser les médias, était toujours intacte. Réponse positive! Le secret ? Un discours offensif. Une charge contre Nicolas Sarkozy, avec demande de pardon pour les propos que le Président avait tenus en juillet 2007 lors de son premier déplacement en Afrique (l'homme africain qui n'est pas assez entré dans l'histoire). "Pardon pour ces paroles humiliantes" a dit Ségolène Royal, "elles n'engagent ni la France, ni les français". Réactions immédiates: le Premier ministre l'a invité a plus de retenue et de dignité lorsqu'elle évoque la France et ses autorités. Et l'UMP l'a accusé de faire de la provocation pour exister pendant que les responsables du PS, contraints et forcés à l'unité en raison des prochaines élections européennes, applaudissaient et soutenaient sans parvenir à cacher leur agacement devant celle qui se présentait en première opposante. Habile! 

Ségolène Royal était notre invitée jeudi dernier. Une interview réalisée après une longue journée d'attente. Sur l'antenne de RFI, elle a expliqué les raisons de sa déclaration de Dakar, les raisons officielles. Mais elle a refusé de sortir du cadre de son voyage au Sénégal pour évoquer plus largement l'Afrique. Dommage! Nos auditeurs auraient sans doute aimé savoir ce qu'elle pensait de la position de Paris vis à vis du Rwanda (relations diplomatiques rompues) puisque son déplacement au Sénégal coïncidait avec la commémoration du quinzième anniversaire du génocide. Et que la Belgique, les Etats Unis et l'ONU ont déjà demandé "pardon". Même chose à propos de la "françafrique" que Ségolène Royal a dénoncée en termes assez vifs. François Mitterrand en son temps, Lionel Jospin, malgré ses intentions proclamées, Jacques Chirac et Nicolas Sarkozy n'ont pas apporté de solution. Manifestement, c'est plus facile à dire qu'à faire. Cela valait bien une réponse !!